Série sur le livre de Jonas, partie 5

« Frères et sœurs, il arrive que nous ayons de la difficulté à accepter un aspect du plan de Dieu. J’ai déjà présenté certaines doctrines comme faciles à comprendre, mais difficiles à accepter, par exemple, le fait que Dieu ait élu certains au salut et a laissé les autres dans leur péché. C’est facile à comprendre, mais c’est tellement plus difficile à accepter en raison de nos préconceptions du bien et du mal par exemple. D’autres fois, la difficulté vient d’une mauvaise doctrine qui a tellement pris racine en nous que ça prend plus d’effort et plus de temps pour la déraciner. La foi docile demande que nous laissions toutes nos pensées étrangères aux Écritures de côté pour adhérer pleinement au merveilleux plan de Dieu. »

 

Introduction

La semaine dernière, nous avons vu dans le livre de Jonas l’équipage dans la tempête. Nous allons lire au chapitre 1 du verset 4 au verset 8.

Mais l’Éternel fit souffler un grand vent sur la mer, et il s’éleva sur la mer une grande tempête. Le navire menaçait de se briser. Les marins eurent peur, ils implorèrent chacun leur dieu et lancèrent dans la mer les objets qui étaient sur le navire pour s’en alléger. Jonas descendit au fond du bateau, se coucha et s’endormit profondément. Le chef d’équipage s’approcha de lui et lui dit : Pourquoi dors-tu ? Lève-toi, invoque ton Dieu ! Peut-être que ce Dieu se modérera à notre égard, et nous ne périrons pas. Ils se dirent l’un à l’autre : Venez, et tirons au sort, pour connaître celui qui nous attire ce malheur. Ils tirèrent au sort, et le sort tomba sur Jonas. Alors ils lui dirent : Explique-nous qui nous attire ce malheur. Quelles sont tes affaires, et d’où viens-tu ? Quel est ton pays, et de quel peuple es-tu ? (Jonas 1.4-8)

 

Exposé

Alors ils lui dirent : Explique-nous qui nous attire ce malheur. Quelles sont tes affaires, et d’où viens-tu ? Quel est ton pays, et de quel peuple es-tu ? (Jonas 1.8)

Le texte mentionne la conviction des marins et du capitaine que la tempête est due à quelqu’un qui attire ce malheur. Une divinité est derrière la tempête. La tradition juive (Daniel Arnold, p. 97) avance la possibilité que la tempête ne frappait que le bateau et ses alentours, donc une tempête surnaturelle qui expliquerait la certitude de l’équipage qu’elle vient d’une divinité. Autrement dit, toute la mer serait demeurée calme, sauf autour du bateau. Ce n’est pas impossible : nous voyons dans le livre de l’Exode que certaines plaies ne frappaient que les Égyptiens et pas les Israélites, mais le texte de Jonas ne nous dit rien. Au verset 8, Jonas a droit à un interrogatoire en règle. J’imagine tout l’équipage rassemblé autour de Jonas. Les vents frappent le bateau qui tangue, c’est-à-dire qui bascule d’un côté puis de l’autre. Tout le monde est trempé. Chacun doit se tenir sur une rampe ou sur le poteau du mat. Là, on questionne Jonas. C’est particulier que les marins questionnent Jonas au lieu de simplement le jeter par-dessus bord. Cinq questions en rafale avant de pouvoir répondre… on se croirait en face de Paul Arcand! L’interrogatoire est justifié puisque, non seulement le sort est tombé sur Jonas, mais aussi en raison de l’attitude particulière de Jonas : le navire est près de se briser et Jonas descend dans le fond du bateau pour dormir. C’est normal que tous les soupçons soient dirigés vers lui. Jonas doit des explications à l’équipage.

Jonas leur répondit : Je suis hébreu et je crains l’Éternel, le Dieu des cieux qui a fait la mer et la terre ferme. (Jonas 1.9)

C’est la première parole de Jonas dans le livre. C’est paradoxal : Jonas ne voulait pas annoncer la repentance aux Ninivites de peur que Dieu leur fasse grâce, et là, Jonas présente son Dieu à des païens. Il se trouve à faire ce qu’il a refusé de faire. Notre Dieu renverse tout ce qui est contre lui. Dans nos vies, c’est la même chose : si nous résistons au Seigneur, il va renverser nos plans afin que son plan se réalise. Que Jonas se présente comme Hébreu ne pose pas de difficulté. Qu’il se présente comme quelqu’un qui craint l’Éternel alors qu’il s’oppose de tout son être à la mission que le Seigneur lui a confiée, ça demande des explications. D’abord, les commentateurs ne s’entendent vraiment pas sur le sens à donner à cette affirmation. Selon Daniel Arnold, Jonas craignait véritablement l’Éternel, assez pour lui exprimer son désaccord. Le Seigneur laisse la place à la réflexion de ses enfants, même si parfois, ça prend la forme d’une contestation. Pour d’autres, cette affirmation signifie simplement que Jonas craignait l’Éternel au sens où il devait être soumis à la loi de Dieu, c’est-à-dire aux rites des sacrifices, aux rites du purification, aux restrictions alimentaires, prescrits par Dieu dans sa loi. Jonas craint l’Éternel, mais il trouve difficile d’accepter un aspect du plan de Dieu qui veut sauver des non Juifs. Rappelons-nous que l’apôtre Pierre a eu la même difficulté.

Frères et sœurs, il arrive que nous ayons de la difficulté à accepter un aspect du plan de Dieu. J’ai déjà présenté certaines doctrines comme faciles à comprendre, mais difficiles à accepter, par exemple, le fait que Dieu ait élu certains au salut et a laissé les autres dans leur péché. C’est facile à comprendre, mais c’est tellement plus difficile à accepter en raison de nos préconceptions du bien et du mal par exemple. D’autres fois, la difficulté vient d’une mauvaise doctrine qui a tellement pris racine en nous que ça prend plus d’effort et plus de temps pour la déraciner. La foi docile demande que nous laissions toutes nos pensées étrangères aux Écritures de côté pour adhérer pleinement au merveilleux plan de Dieu. Jonas présente Dieu comme :

[…] le Dieu des cieux qui a fait la mer et la terre ferme. (Jonas 1.9)

« Le Dieu des cieux qui a fait la mer » : le bateau avait besoin d’entendre qu’il y a un Dieu qui a créé la mer et qui est donc en contrôle de la mer; et le Dieu qui a créé la terre ferme, exactement là où tout le monde avait besoin de se retrouver. Cette présentation n’est pas banale : bien qu’elle ne soit pas présentée comme une exhortation à se repentir, elle dirige les marins à considérer le seul vrai Dieu, le créateur.

Ces hommes furent saisis d’une grande crainte […] (Jonas 1.10A)

Les marins ont aussi une crainte, mais c’est plutôt la terreur qui les habite. Quand Jonas s’identifie comme Hébreu, c’est la peur. D’où vient cette crainte? Les marins étaient habitués de côtoyer des personnes qui adorent d’autres divinités. Le verset 5 (Jonas 1.5) nous dit que chacun a imploré sa divinité. James Montgomery Boice propose ce qui suit : les marins passaient de port en port; ils parlaient et discutaient avec des personnes de tout l’empire et de façon privilégiée avec les voyageurs. Ils entendaient des histoires de partout dans l’empire. C’est sûr qu’ils avaient aussi entendu parler des Hébreux et de leur histoire.

Ce Dieu avait ouvert la Mer Rouge pour laisser fuir son peuple d’Égypte et a refermé cette même mer sur l’armée égyptienne et son pharaon. Quarante ans plus tard, ce même Dieu a fait tomber les murs de Jéricho afin que son peuple entre dans le pays promis. Par la suite, ce même Dieu a permis que cette nation ridicule à vue humaine prenne possession de tout le pays, ce qui implique autant de victoires sur les peuples qui l’occupaient.

Le Dieu d’Abraham, d’Israël et de Jacob est un grand Dieu, le seul grand Dieu, et il l’a démontré nombre de fois. Ça peut très bien expliquer la crainte des marins, mais aussi, dans les religions païennes, les divinités étaient vues comme très sévères et promptes à punir. Dans ces religions, et chaque marin faisait partie de l’une d’elles, il n’y avait jamais de place à la repentance et au pardon. Au plus, on pouvait apaiser l’humeur capricieuse des divinités.

Ces hommes furent saisis d’une grande crainte et lui dirent : Qu’as-tu fait là ! Car ces hommes savaient qu’il fuyait loin de la face de l’Éternel, parce qu’il le leur avait expliqué. Ils lui dirent : Que te ferons-nous, pour que la mer se calme envers nous ? Car la mer était de plus en plus démontée. (Jonas 1.10-11)

La question qui suit immédiatement : « Qu’as-tu fait là ! » : autrement dit, « Qu’est-ce que tu as pensé de fuir ce Dieu grand et redoutable ? Qu’est-ce que ce Dieu t’a fait pour que tu fuis comme ça ? » Imaginez le mauvais témoignage lorsque des non chrétiens voient notre désobéissance. Il y a des personnes qui ont présenté l’évangile à leurs proches durant des années, et puis, ces personnes abandonnent la vie chrétienne. Imaginez le message négatif envoyé aux proches. On peut imaginer des pensées comme : « Tu rejettes ce à quoi tu voulais que nous adhérions ! Le Dieu que tu nous présentais t’a sûrement déçu au plus haut point ! »

Jonas répondit aux marins : Prenez-moi, jetez-moi dans la mer et la mer se calmera envers vous ; car je sais que c’est moi qui attire sur vous cette grande tempête. (Jonas 1.12)

La motivation de Jonas est inconnue. Peut-être qu’il partage la pensée des marins à savoir qu’une telle punition va satisfaire Dieu; peut-être qu’il est suicidaire. Au chapitre 4, il demande à deux reprises à Dieu de lui prendre la vie (Jonas 4.3; Jonas 4.8). Peut-être est-il courageux et généreux en voulant se sacrifier pour sauver l’équipage. Alors, pourquoi n’a-t-il pas sauté par-dessus bord lui-même ? En fait, nous n’en savons rien. Ce qui ressort, c’est que Jonas reconnaît sa culpabilité. Le verset 12 termine par :

[…] je sais que c’est moi qui attire sur vous cette grande tempête. (Jonas 1.12)

Ce qui plaide en faveur d’une foi réelle de Jonas en dépit de sa fuite et de sa désobéissance, c’est qu’il n’est jamais paniqué dans le récit. Il dort au fond du bateau. Même lorsqu’il propose d’être jeté par-dessus bord, il n’a pas peur, alors que l’auteur rappelle la peur qui a envahi les marins. J’ai trouvé un commentateur qui pense plutôt que Jonas préfère mourir que d’annoncer la repentance aux Ninivites. En vérité, nous ne pouvons être certains des motivations de Jonas ici. L’offre de Jonas d’être jeté à l’eau par les marins est paradoxale. Jonas n’a pas voulu se rendre à Ninive pour que des païens soient sauvés, et là, il est prêt à être sacrifié pour que les marins païens échappent au naufrage. Il est possible que, dans le cas des Ninivites, Jonas soit heurté dans sa théologie. Nous avions parlé du fait que les Juifs souffraient de particularisme ethnique, c’est-à-dire que les promesses de Dieu doivent être exclusivement déversées sur la nation juive, mais ce que Dieu demande à Jonas est un message de repentance, parce que Dieu veut faire grâce à cette nation. Or, comme nous l’avions vu dans les dernières semaines, les Assyriens étaient les ennemis jurés d’Israël à cette époque et les plus sanguinaires. Alors, comment accepter que Dieu fasse grâce aux Ninivites alors qu’ils sont aussi méchants (le verset 2 l’affirme) alors que les Juifs doivent se soumettre à une loi rigide? Est-ce que Dieu peut faire grâce à une nation qui n’a pas la circoncision, qui n’a pas de temple ni de sacrifices prescrits par Dieu? La réponse est oui et sera confirmée dans la nouvelle alliance. Toutefois, Jonas semble heurté face au projet de Dieu pour les Ninivites. Daniel Arnold affirme : « Jonas n’est pas contre la miséricorde et le pardon. Il est contre l’étendue illimitée de l’amour divin. » Daniel Arnold propose même que la pensée suivante ait passé par la tête de Jonas : « Par son sacrifice, Jonas pense-t-il donner mauvaise conscience à Dieu? Lui dirait-il : « Tu veux me tuer parce que je ne suis pas prêt à sauver des païens, mais toi, tu es prêt à tuer un équipage beaucoup moins coupable que les Ninivites »? » Pourquoi Jonas ne saute-t-il pas à l’eau? Peut-être pour ne pas ajouter à son dossier le péché du suicide.

Frères et sœurs, si Jonas était scandalisé à l’idée que Dieu fasse grâce à des pécheurs notoires comme les Ninivites, c’est qu’il voyait son péché comme étant moins grave, plus acceptable pour Dieu. Peut-être que nous ne ciblons pas une nation entière comme étant plus pécheresse, mais il est possible que nous regardions d’un mauvais œil un Musulman qui se convertit à Jésus-Christ, ou encore un criminel qui se convertit à Jésus-Christ. Le Seigneur est venu dans le monde pour sauver des pécheurs. Il n’est pas venu pour les bien-portants, mais pour les malades. Nous devons nous réjouir lorsque le Seigneur sauve des personnes parmi les plus endurcis et nous devons les accueillir. Les portes de notre bâtiment, nos bras et nos cœurs doivent être grand ouverts pour les accueillir, comme le Seigneur nous a accueillis.

Que le Seigneur vous bénisse.

Daniel Durand, pasteur
10 avril 2019

Prédicateur invité

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